[TMN#15] Spécial Lausanne : Des Journalistes Parlent De Vous

On a passé la semaine dans un endroit formidable.

Le congrès mondial des journalistes scientifiques (WCSJ 2019) s’est tenu  à Lausanne du 2 au 4 juillet et il a été évidemment beaucoup été question de vous pendant ces quelques jours.
On en a tiré quelques leçons qu’on vous livre pêle-mêle.
3… 2… 1… Inspiration.
Laurent de TheMetaNews


La vérité scientifique existe.
La Terre est ronde. Les vaccins sauvent des vies. Le tabac tue. Le climat change. L’historienne des sciences Naomi Oreskes, célèbre pour son livre Les marchands de doute, l’a rappelé lors d’une plénière le 4 juillet à Lausanne : « Un débat scientifique n’est pas un débat politique » et les controverses scientifiques ne doivent avoir qu’un temps. N’oubliez pas que vous êtes les seuls habilités à parler de science : ne laissez pas à d’autres (juristes, avocats, lobbyistes) ce privilège.


La vulgarisation n’est pas un luxe.

A l’heure des fake news, peu de médias eux font pourtant aujourd’hui ce pari dans leur ligne éditoriale, malgré l’affichage de patrons de presse, comme Jérôme Fenoglio, le beau contre-exemple de Heidi News (suisse, certes) les dires de Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, qui a vanté en ouverture du WCSJ 2019 les vertus du journalisme contre « l’illettrisme scientifique ».


Les journalistes sont vos amis. 

On a noté à la volée ce témoignage d’une journaliste anonyme lors d’un workshop le 1er juillet : « Les contribuables payent, il faut que les chercheurs parlent. Mais parfois il faut les supplier ». On en vient à la question de la relecture des citations, souvent cruciale. La relecture est en substance un accord de gré à gré entre l’interviewé et l’intervieweur mais ne s’étend pas à tout l’article. C’est une des différences entre journalisme et peer reviewing. 


Une histoire plutôt qu’un long discours. 

Pour lutter contre les fake news, il faut évidemment des chiffres et des faits mais aussi des histoires et des émotions. C’est en substance ce qu’a rappelé à l’inauguration Carlos Moedas, Commissaire européen à la recherche : « Les preuves ne sont plus suffisantes, il faut raconter une histoire ». Et les chercheurs doivent incarner, parfois à leur corps défendant, ces histoires. 


Un graphique peut tout changer.

Il n’a jamais été aussi facile de produire de belles infographies à partir de vos données. Voici une liste d’outils (présentés lors d’un workshop par Jason Treat, dont voici le travail), qui vous permettront d’apporter une “touch” à vos posters ou publis : 

En somme, les chercheurs doivent acquérir une forme de “datalitteracy”, pour employer un anglicisme intraduisible mais que vous comprendrez.


Les statistiques peuvent tuer.

C’est un sujet qui nous tient à coeur à TheMetaNews et il en a encore été question au WCSJ 2019, grâce à Valentin Amrhein, dont voici les slides et les sources. Nous vous les transmettons pour que le message passe encore une fois : le fait qu’un résultat n’atteigne pas la significativité ne veut rien dire. Écarter ou accréditer une hypothèse sur cette seule base peut même avoir des conséquences funestes.


Le harcèlement est un vrai sujet.

C’est un vrai sujet pour les médias, bien sûr, mais aussi pour les chercheurs. Si vous voulez en quelques points un tutoriel, pensé pour les journalistes mais qui vous en apprendra beaucoup sur la psychologie des victimes, le voici, conçu par la psychologue américaine Lucy Maddox, intervenant dans un workshop sur le sujet.


Le preprint change les règles.

Il les change à la fois pour le meilleur : « Le preprint permet d’accélérer la recherche », analyse Theodora Bloom du British medical journal, notamment en raccourcissant les délais de publications de 12 mois à… 1 ou 2 jours. Mais aussi pour le pire, puisque le preprint “disrupte” les règles de diffusion de l’info auprès du grand public, surtout dans la recherche médicale ou dans la santé. Leur explosion (cliquez sur l’image pour la source) signe en tout cas un renversement culturel chez les chercheurs.


Youtube, c’est formidable.

A tel point que les journalistes scientifiques voient en les youtubeurs scientifiques des concurrents potentiels. Vidéos punchy, vulgarisation parfois pointue, parfois pop sur des sujets pourtant ardus. En bonus, Youtube gère nativement le Graal de tout média : l’interaction directe avec sa communauté. Jetez un oeil sur ce thread très bien fait des débats et un deuxième sur les chaînes des intervenants du workshop de Lausanne : Scilabus, Science4All. Sans même parler des stars comme E-penser ou Dr Nozman (plus d’un million d’abonnés chacun).


Si vous aimez un média, achetez-le.

C’est évidemment un clin d’oeil à notre cas personnel (on vous en dit plus bientôt) mais côté “business model”, la “diversification”, comme on dit poliment dans le métier pour parler de revenus hors abonnement (publicités ciblées, conférences…) a ses limites. On en profite pour faire un clin d’oeil à la newsletter d’Alison Motluk Hey Reprotech – devenue payante il y a peu – sur la science de la reproduction.


ET POUR FINIR

Si vous voulez mettre un visage sur les voix que vous entendez au téléphone à des heures indues vous poser des questions inadéquates (ou l’inverse), voici la délégation française du Congrès de Lausanne presque au complet. Ne reste maintenant qu’à trouver votre serviteur parmi cet aréopage.